La journée avec...

Publié le par Jean-Michel

Valérie et Pascal Aget, en première ligne du Carnaval


Pour tous les carnavaleux, elle est La vache. Lui, c'est Le Basque. Des surnoms en lien avec les costumes qu'ils portent chaque week-end, jusque fin mars.

 

Valérie et Pascal Aget ne rateraient le carnaval pour rien au monde. Ils se sont rencontrés au bal des Acharnés le 21 février 1992. Ils ne se sont plus quittés.

Chaque année, ils sont quasiment de toutes les bandes et font cinq ou six bals, toujours les mêmes. Le monde du carnaval de Dunkerque est celui des rites et des traditions qui commence véritablement aux douze coups de minuit sonnés lors du bal du Chat Noir. Les dates des villes sont fixées en fonction de Mardi Gras, dans un ordre immuable. Seule la Guerre du Golfe avait réussi à chambouler la fête avec l'annulation de la quasi totalité des bals.

Rendez-vous à la chapelle

Chaque hiver, Valérie et Pascal posent des congés. Elle est secrétaire médicale, il est électricien : « On prend le lundi pendant toute la durée du carnaval et la semaine complète fin février, pendant les 3 Joyeuses. Généralement, on s'arrête après Bergues vers le 23 ou 24 mars. » Ils ont une cagnotte carnaval qu'ils constituent tout au long de l'année : environ 500 E, essentiellement pour accueillir les carnavaleux lorsque leur maison devient chapelle au carnaval de Malo. Ce jour-là, ils servent à boire et à manger aux amis, aux connaissances et à tous ceux qui savent frapper aux bonnes portes, soit 180 personnes en moyenne.

Par chance, ils ne paient pas l'entrée des bals car Pascal est membre de la société des Kakernesches depuis plus de vingt ans. À ce titre, il y a les bals où il s'amuse et d'autres où il fait partie des organisateurs. Dans tous les cas, Valérie n'est jamais très loin. Pascal confirme : « On n'est pas du genre à faire carnaval chacun de son côté. On part ensemble, on rentre ensemble. Au fil du temps, on s'est constitué un groupe d'amis. D'année en année, on devient plus raisonnable. On arrête généralement vers 2 h sauf pour les 3 Joyeuses, où, quand on repart, il est 8 h 30 . » Sur les étagères d'une vitrine installée dans le salon, trônent des figurines à leur effigie en tenue de carnaval. Des cadeaux offerts à Pascal par son épouse. Valérie détaille le pantalon noir, la chemise blanche et le béret basque de Pascal qui renchérit : « Le même personnage depuis vingt ans.

Comme je n'aime pas le maquillage, je mets un peu de fond de teint, du noir autour des yeux et deux ronds rouges sur les joues. Avant d'être Basque, je me cherchais. Un temps, j'ai été Noir avec un pagne et un collier. Mais j'ai toujours le même parapluie. Avec mes écussons. Et Pascal d'égrener : « Dunkerque, Jean-Bart, le Beffroi, Cô Pinard II, l'ancien écusson des Kakernesches, leur nouvel emblème, la tour du Leughenaere et le géant Reuze papa.

 »

La bande sur les épaules

Pascal a déjà usé deux costumes de Basque. Ses vêtements sont soumis à rude épreuve. Car il fait partie des premières lignes qui rythment l'allure de la bande et déclenchent chahuts et marches au rythme de la musique sous les ordres du tambour major. Il fait partie des « murs » qui, arrimés bras dessus, bras dessous, doivent s'arc-bouter pour retenir la foule poussant derrière. La première ligne, c'est les costauds : une moyenne de 100 kg par tête. Pascal ne fait « que » 91 kg mais il a une carrure athlétique liée à ses années de footballeur semi-professionnel à Gravelines : « À l'époque, l'entraîneur nous interdisait de faire carnaval. Je me souviens d'un dimanche contre Beauvais, où, sur la porte du vestiaire, il y avait ma photo, déguisé. J'ai nié en bloc et, heureusement, j'ai arrêté trois pénaltys. En fait, je ne ratais aucun bal ni même une bande. Et quand on jouait à l'extérieur, j'y allais au retour des matches.  » Des souvenirs, Pascal en a plein. Une file indienne à Brouckerque : « Toute la bande a suivi. Ça faisait un drôle de cortège . » Une autre fois, c'était en marche arrière. À Grande-Synthe, le tambour major a échangé sa baguette contre sa place en première ligne pendant un quart d'heure.

Ou la fois de l'accident : « À la Citadelle, la bande est passée sur un pont. La rambarde a lâché et, en première ligne, on a fait une chute de 4 mètres : 200 personnes nous sont tombées dessus. Ça m'a valu un traumatisme crânien et une cheville cassée. J'ai signé une décharge à l'hôpital pour continuer carnaval. Mais je n'ai pas repris ma place dans la bande. Je suis resté sur le côté. ».

Valérie avoue trembler souvent pour son mari. Ne serait-ce que parce que, victime de son succès, le carnaval attire de plus en plus de monde qui défile sans connaître les règles. Ou à cause de quelques personnes trop alcoolisées qu'il faut protéger malgré elles lors des mouvements de foule. Mais la passion l'emporte surtout lors du rigodon final, lorsque la cantate à Jean-Bart vrille les coeurs et marque la dislocation.

Chez Valérie et Pascal, comme dans toutes les maisons ici, les chants de carnaval résonnent de la mi-janvier au printemps. Pour se mettre dans l'ambiance puis faire durer le feu. Leur meilleur carnaval ? « C'est toujours le prochain ! »

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